OI BOYS – « Oi Boys » (2021)
– Les Disques de la Face Cachée, Dans le vide, Maloka, Hidden Bay, Kanal Hysterik, Amour entre chien et loup –
Pas si Oi, pas si fun…
Imaginez vous deux secondes, vendredi soir, synonyme de liberté conditionnelle insipide post-routine, les derniers rayons du jour laissent transparaître le ciel d’un gris blanc dessinant la rigueur d’une ville industrialo-post-gothique désuète, l’air hagard sous votre hoodie un peu trop grand, vous traversez le centre ville pseudo-léthargique, avant de prendre votre chemin de traverse que seuls les initiés connaissent avant de passer dans ce sous-bois synonyme de nouvelle jeunesse, à vos pieds des restes de fix, des capsules de 16 et les souvenirs passés des lieux suintants, bienvenue à Metz. | Par Nino Futur
Ok, j’ai peut être voulu mettre le paquet dans cette intro mais il fallait peindre le portrait bien caricatural de la ville lumière afin de bien cerner tout l’esprit de Oi Boys.
Dans la toute droite lignée de ce qu’avait débroussaillé sur le chemin de la grisaille la gloire locale Noir Boy George en 2014 avec le désormais culte « Metz Noire », Oi Boys reprennent le flambeau d’un quotidien morne décrit sous toute la froideur d’un synthétiseur bon marché.
Duo d’obédience cold-punk, post-punk synth minimal-Gloom Oi (pourquoi pas?) composé de deux comparses ayant fait leur armes tant du côté metal noir de la force (Loth) que du rap (Voodoo Clan) ou de la noise.
Oi Boys c’est avant tout une question de savoir-spleener avec panache, de la moindre sonorité, jusqu’au moindre replis des textes, tout est là pour nous faire ressentir le singulier frisson hiémal du seum.
Dès son introductif « La liste », toutes les cartes sont posées sur la table, on sait tout de suite qu’Oi Boys ne sont pas là pour nous faire chanter bras dessus bras dessous comme au coin du virage, contrairement à ce que leur nom laisse présager.
Bien qu’absolument pas Oi, ni pour le moins fun, on y retrouve dans la rudesse des textes (« Tes mortes idoles », « Mon dernier dieu », « Dernière tournée ») ce même sentiment d’imperfection quotidienne, cette même sensibilité prolétaire que l’on trouverait également du côté des stéphanois de Zone Infinie ou de Litovsk, la candeur du punk moderne résigné.
Dans la droite lignée du messin providentiel Noir Boy George, notre duo nihilistement oi enchaîne les tableaux d’une vie d’errances nocturnes grisonnantes. Partageant ce même goût pour le mix brut et les mélodies en sous sol froides, c’est à l’écoute de l’évident tube « Sur la place » (spécial big up à tous les narvalos qui se sont fait tatouer les lyrics pour le clip) que l’on saisit tout le potentiel du duo à mettre en forme de véritables fêtes tristes à n’en déplaire aux Denaisiens de Trisomie 21.
Cette maîtrise de la mélodie de synthé efficace et non pompeuse nous laisserait croire à une version franche et loin du hipsterisme de Rendez-vous.
Entre le post-punk moite de « Mon dernier dieu » jusqu’à « Les réverbères » c’est une véritable ambiance de fin de kermesse nébuleuse couplée à une odeur de café froid qui émane de l’album. On se perçoit aisément sous les spots d’une fête de village admirer les derniers survivants tenter de s’accrocher aux dernières braises de plaisir futile sous fond de « 8200km/h ». Dernier tour de piste pour le clown triste sur « Mourir accompagné de rien » qui vient clôturer l’album en beauté avec son refrain aussi juste que débraillé.
Un savant mélange entre la cassosserie d’un Cuir, le nihilisme urbain de Noir Boy George, la fausse poésie d’un Zone Infinie et la froideur d’un Hinin, tant de références françaises nous montrant qu’en terme de sonorité froides et de larmes à tirer, la France détient de belles flèches en son carquois et que par conséquent Oi Boys parviennent haut la main à s’y ajouter tant ce premier effort est maîtrisé.